SOURCE : FÉDÉRATION ADDICTION | Mars 2020
S’il en était encore besoin, l’inquiétude de beaucoup de nos patients, l’émotion voire même l’agitation actuelle dans les foyers pour jeunes et adolescents ou dans les lieux de privation de liberté confirment bien que la dépendance au cannabis et donc les syndromes de sevrage existent bel et bien !
Dorénavant, le présent nous frappe et le confinement pour tous, l’enfermement pour certains posent avec une nouvelle acuité l’éternel problème de l’addict : gérer sa dépendance dans un contexte de crainte de pénurie. La réponse peut paraitre simple : il suffit d’arrêter. On pourrait se dire « Très bien, à quelque chose malheur est bon, cela va au moins les aider, les forcer à décrocher ». Cette idée réactive le mythe du « Ce n’est qu’une histoire de volonté » et de la prohibition comme solution. Le confinement dès lors en deviendrait l’instrument, une sorte d’abstinence obligée grâce à une claustration salvatrice.
Mais le trouble de l’usage (la « dépendance »), y compris avec le cannabis, n’est précisément plus affaire de volonté et, même après une période d’abstinence contrainte de quelques mois, la rechute est quasiment assurée à l’issue, si on n’a pas saisi avec l’usager cette occasion de mobilisation et de changement. Dans ce cas, il nous semble donc prioritaire d’assurer la continuité de l’accompagnement et des soins, y compris sur un plan de réduction des risques (RDR) et y compris en milieu pénitentiaire. Il faut par exemple soutenir une garantie d’approvisionnement en produits de dépendance légaux (tabac), en traitements de substitution (TSN, opiacés) mais aussi être en mesure d’aider ceux qui le souhaitent à réduire ou à arrêter en accompagnant leur sevrage (notamment de produits illicites comme le cannabis). Cela repose sur un constat pragmatique : l’angoisse cardinale de l’addict est celle du manque. Et l’angoisse, le stress sont les moteurs essentiels du besoin irrépressible de consommer, du « craving », a fortiori dans un contexte général d’angoisses collectives liées au COVID encore amplifié par la promiscuité et la violence de la détention …